mardi 7 mai 2013

L’ostéopathie pour rééquilibrer les bébés


Avec ses mains, l'ostéopathe mobilise le corps du bébé. Il le manipule doucement, pour éliminer les tensions et contraintes liées à la compression dans le ventre de sa mère et aux traumatismes de la naissance.
Florence Arnold-Richez  - Crédit photo : Francine Bajande  -  Avec le Dr Bernard Roth, pédiatre attaché à la maternité du centre hospitalier de Sélestat, dans le Bas-Rhin. - 3 mai 2013
Coliques, torticolis, maux de tête, digestion difficile… Votre tout-petit peut connaitre quelques désagréments après la naissance. Les débuts d’une vie sont parfois un peu laborieux ! Dans le corps humain, tout est relié et un dysfonctionnement peut en entrainer un autre. Si votre nourrisson a un torticolis et des coliques, il peut y avoir un lien de cause à effet. Le bon réflexe : vous rendre chez un ostéopathe spécialisé. Non seulement ce professionnel rééquilibrera le métabolisme de votre nouveau-né mais en plus celui-ci en sortira relaxé.
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    Jamais de craquements

    Noa, 1 mois et 8 jours, emmitouflé dans son pilote matelassé, a l’air d’un cosmonaute en hibernation. A l’intérieur de la maternité du centre hospitalier Louis Pasteur de Sélestat, derrière les fenêtres en hublot de bateau, chaleur douce en plus, c’est la même sensation d’enveloppement que dans un cocon douillet. Le Dr Bernard Roth, pédiatre et ostéopathe attaché à la maternité, consacre sa consultation de cet après-midi à la “médecine manuelle ostéopathique”. « Salut bout de chou ! Vous êtes la maman ? Venez à côté de moi. » Macha s’exécute, c’est plus rassurant pour son bébé. « Ça va mieux ? », poursuit-il. « Oui, il est bien moins bloqué ! » A son quatrième jour, avant sa sortie de la maternité, Noa avait été signalé au médecin par l’une des sages-femmes pour un torticolis. Formées depuis longtemps à toutes les pratiques « autres que la gynécologie obstétrique pure et dure : sophrologie, acupuncture, homéopathie, liberté de postures d’accouchement… », comme le dit le Dr Christian Grall, le chef de service, les sages-femmes de cette maternité procèdent toujours ainsi. Lors de la visite réglementaire de sortie, elles sollicitent le Dr Roth, pour diagnostiquer les troubles nécessitant éventuellement des mobilisations manuelles : pieds qui tournent, clavicule fêlée, pleurs excessifs, difficultés à téter, torticolis, puis, un peu plus tard, troubles du sommeil, coliques, reflux, crâne aplati à l’arrière, otites, pleurs chroniques… Il mobilise, stimule, masse, mais toujours après avoir fait un examen clinique traditionnel complet, voire prescrit des examens complémentaires si nécessaire. Il insiste : « Ce n’est pas de l’ésotérisme, mais de la médecine. ». « Je pousse, je tire et Noa s’étire… ». Aujourd’hui, Macha consulte car Noa a des problèmes de digestion. Le médecin enlève le pilote du bébé. Mais pas les chaussettes. « Ils détestent tous avoir les pieds nus ! » Il le prend délicatement “en berceau”, la petite tête moulée dans sa grande paume et le corps allongé sur son avant-bras. « Jamais sous les aisselles car il faut éviter tout ce qui pourrait le mettre en hyperextension vertébrale. » Il entoure maintenant le crâne duveteux de ses deux paumes : « La chaleur de mes mains a des vertus calmantes. » Dans cette pratique, tout est douceur, mise en condition sécurisante, maternante. Sans jamais effectuer de craquements, manipulations ou pressions fortes. Mais toujours avec des mobilisations successives et délicates, des effleurages et massages légers. La médecine manuelle ostéopathie (le Dr Roth tient à cette appellation) « consiste en un ensemble de gestes qui permettent de diagnostiquer du bout des doigts, puis de traiter manuellement les dysfonctions du bébé en restaurant la mobilité de ses muscles, ligaments, tissus et sutures », dit-il.
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    Manipulations du crâne pour relâcher les tensions

    « Alors Noa, prêt pour l’aventure ? » Sourire aux anges, à sa maman ou au pédiatre, on ne sait… Le médecin explique à Macha. « Dans votre ventre et lors de sa naissance, Noa a été soumis, comme tout bébé, à des contraintes mécaniques plus ou moins traumatisantes. D’autant plus s’il a fallu recourir aux forceps ou ventouses. D’où des microdéplacements entre l’os occipital, à l’arrière de son crâne, et les premières vertèbres de son cou. Sa tête s’est mise à tourner, à pencher sur le côté, et les muscles de son cou se sont contractés en un mouvement réflexe : c’est le torticolis. Je vais vérifier les sutures osseuses de son crâne qui, peut-être, se chevauchent encore un peu. » Le médecin inspecte délicatement les fontanelles de Noa, allongé sur le dos. Du bout des doigts, il palpe la suture entre l’occiput et l’os temporal, la “mastoïde”, là où se situe le “trou déchiré postérieur”. Un drôle de terme qui définit l’endroit où passent des nerfs commandant de grands organes, comme l’estomac et les intestins avec le nerf pneumo­gastrique. « Je mets en “rapprochement” cette zone : je perçois sous mes doigts un relâchement. Je peux aussi la mettre en tension puis attendre le relâchement des tissus », dit-il en stimulant des points réflexes d’acupuncture dans une zone du crâne appelée “triade des céphalées”. Il y passe, selon cette médecine chinoise, les vaisseaux gouverneur, vésicule biliaire et vessie, points de réflexothérapie par lesquels le praticien rééquilibre le système nerveux végétatif. « Je pousse, je tire et bascule successivement chacun de ces points. Le bébé s’étire… » 
    Le bébé en pédale de bonheur ! Le Dr Roth enfile ensuite un gant en latex et glisse un doigt dans la bouche du bébé, déclenchant le réflexe apaisant de succion. En même temps, cette “prise de palais” lui permet d’évaluer la façon dont le bébé tète et, simultanément, de stimuler, de l’intérieur de la bouche, la zone de tension entre l’occiput et l’os sphénoïde, toujours à la base du crâne. Puis, il mobilise un autre os sous la langue, l’hyoïde, car Noa a un peu de mal à déglutir. Pas très content, cette fois, mais nettement plus cool lorsque le médecin “travaille” délicatement son diaphragme qu’il met en tension et dont il accompagne le mouvement, dès qu’il inspire.
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    Des viscères au dos, une exploration complète

    Le pédiatre maintient désormais Noa en position assise contre lui. Des deux mains, il mobilise son estomac, en le poussant posément vers le bas. Puis le médecin allonge à nouveau Noa. Ses paumes sur le ventre du bébé, un peu tendu par des gaz, il masse dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. « Je disperse l’excès d’énergie des viscères en partant du nombril, pour aller vers l’extérieur. S’il était constipé, je ferais l’inverse », dit-il. Puis, à l’aide de ses doigts repliés en griffes, de chaque côté du nombril, et en allant encore une fois vers les flancs, il pratique des massages tibétains : « Je sollicite ainsi les capteurs vibrateurs de la peau. Le but de ces gestes est d’inonder de signaux mécaniques la moelle épinière, pour y bloquer les messages douloureux issus des organes, en recherchant un relâchement des tissus. » Dernier épisode de cette séance qui a duré plus de 20 minutes : le Dr Roth pinçote comme une corde de guitare, chaque étage de la colonne vertébrale de Noa, allongé sur le ventre. Il insiste entre les vertèbres T9 et T5, espace déterminant pour le fonctionnement du tube digestif. Puis, les doigts repliés, il bloque, pousse, pétrit comme une bonne pâte la peau sous la nuque, riche en capteurs neurovégétatifs destinés à la moelle épinière cervicale, laissant, de chaque côté, une ligne de petits ronds blancs.
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    Tordre le cou au torticolis

    Kewan a un torticolis du côté gauche, mais n’a pas l’air de souffrir le martyre. Pour l’heure, il décoche à l’assistance une série de grimaces drolatiques, comme seuls les nouveau-nés savent en faire. Sa maman, Jessica, se positionne comme Macha tout à l’heure, à côté du médecin qui entoure les oreilles et le front du bébé de ses paumes chaudes. « Allez mon bonhomme ! Je tourne, je teste la limitation de la rotation à gauche… » Avec la pulpe des index, il stimule la suture au-dessus du nez, pour dégager le canal lacrymal. Puis il met un doigt sur chacune de ses tempes pour exercer une pression sur les os dont les sutures peuvent aussi jouer un rôle dans la fixation du torticolis. « Je sens bien qu’il n’a pas mal ! », dit-il rassuré. D’ailleurs, Kewan bâille à s’en décrocher la mâchoire. La tête du bébé empaumée des deux côtés, le médecin lui imprime un mouvement de balancement en “ni oui ni non”, de droite à gauche. Il mobilise ensuite toutes les vertèbres cervicales. Enfin, de son doigt ganté, il fait une “prise palatine” tout en reproduisant, la tête en flexion, le même mouvement de ni oui ni non. Pas de chouinement. Au contraire, Kewan est détendu, presque endormi !Debout, le Dr Roth l’installe à plat ventre en oblique contre son torse, tête vers le bas pour la mobiliser de droite à gauche, en profitant de l’effet de pesanteur. « Le torticolis s’est nettement débloqué, commente-t-il pour David, le papa, et Jessica. Mais, pour améliorer le résultat, je vous conseille de corriger ses postures du quotidien, de sorte à stimuler son regard de l’autre côté : comme il est en latéroflexion gauche rotation à droite, positionnez le berceau de telle sorte que son regard soit attiré vers la lumière côté gauche. Surélevez son lit par une cale unique en haut à droite. Placez son mobile au pied du lit. Donnez-lui le biberon côté gauche si possible. Evitez qu’il ne glisse en bas de son transat, pour ne pas aggraver l’extension de la nuque quand il cherche à voir son entourage… Je le revois à 3 semaines et à 2 mois ! » Kewan s’est endormi tout contre sa maman. « La maman est cool, donc le bébé l’est aussi. Normal, il en est la photocopie émotionnelle ! », conclut-il. 


    RQ: De plus en plus de mutuelles prennent en charge ces consultations (renseignez-vous préalablement auprès du praticien).

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